Né en 1919, l’architecte André Ravéreau cumule aujourd’hui une œuvre construite et écrite qui est un manifeste en faveur d’une architecture cohérente et située. Il s’est beaucoup consacré à l’étude des architectures et cultures méditerranéennes, toujours dans le souci de comparer la pertinence du geste savant à celui du savoir-faire vernaculaire.
En 1965, André Ravéreau est pressenti par le ministère de l’information et de la culture d’Algérie pour devenir architecte en chef des Monuments historiques. Installé à Ghardaïa, il s’emploiera à sauver une grande partie du patrimoine culturel et architectural du pays. Il obtiendra le classement de la mosquée de Sidi Okba et de la ville de Ghardaïa aux monuments historiques algériens, ouvrant ainsi la voie au classement de Ghardaïa au Patrimoine Mondial de l’Unesco. En 1970, il crée un premier atelier du ministère – l’atelier d’étude et de restauration de la vallée du M’Zab – qui permit à quelques jeunes architectes, qui s’y étaient présentés, de réaliser de nombreux relevés des maisons mozabites.
Insatisfait des moyens limités qu’offrait le ministère, André Ravéreau crée en 1973, à l’aide de Naït Ali, haut fonctionnaire algérien du ministère de l’Intérieur, un second atelier, l’E.R.S.A.U.R.E. (Établissement Régional Saharien d’Architecture, d’Urbanisme et d’Environnement) plus communément appelé l’atelier de Ghardaïa ou, a posteriori, l’atelier du désert. Il y voit l’opportunité de proposer un enseignement différent de celui qu’il avait reçu aux beaux-arts, basé sur l’apprentissage d’une culture constructive par la pratique, par le chantier. Bien qu’il ne s’agisse pas de protections, de nombreuses maisons furent ainsi restaurées et quelques constructions neuves réalisées dont les logements économiques de Sidi Abbaz.
En 1975, par un fâcheux concours de circonstances, André Ravéreau est éconduit de l’atelier et contraint de se retirer en France où il s’installe définitivement. Aidé de son bras droit, sa compagne Manuelle Roche, il rédige et publie son premier livre, Le M’Zab, une leçon d’architecture. Depuis sa résidence ardéchoise, il continue à concevoir une architecture située. C’est ainsi qu’il obtient en 1980 le prix d’architecture Aga Khan pour le centre de santé de Mopti. Puis, en 1983, la médaille d’argent de l’urbanisme lui a été décernée par l’académie d’architecture pour l’ensemble de son œuvre. C’est récemment, en 2012, qu’il a reçu la médaille du mérite de l’Algérie pour sa contribution à la valorisation du patrimoine de ce pays.
André Ravéreau n’imite pas les formes de l’architecture vernaculaire mais cherche à la comprendre pour mieux inscrire ses réalisations dans l’épaisseur d’une culture. « Je me penche beaucoup sur l’architecture dite « populaire ». J’y trouve des subtilités constructives savoureuses, des inventions, une rigueur qui, à mes yeux, fait défaut à certaines architectures « de représentation ». […] [L]’architecture dite populaire est aussi savante dans la mesure où elle est le fruit d’un savoir très élaboré. » [André Ravéreau dans Vincent Bertaud du Chazaud, André Ravéreau, Maya Ravéreau, Du local à l’universel, Paris, éditions du Linteau, 2007, p. 105.]
Par la suite, son travail en tant qu’architecte conseil du C.A.U.E. de Lozère de 1985 à 1993, lui inspire de nombreuses publications aux ambitions renouvelées. Suite aux études approfondies de différents lieux, du M’Zab au Caire en passant par Alger, qui ont abouti pour la plupart à des publications, André Ravéreau entame alors une série de travaux portant sur le détail des éléments d’architecture savantes et vernaculaires, à travers l’ensemble de la Méditerranée : la baie, le chapiteau, le portique …
Jusqu’à l’âge de 98 ans, il a poursuivi inlassablement ces divers travaux, fidèlement illustrés des fonds photographiques de Manuelle Roche, et sans cesse enrichis de nouvelles réflexions.
André Ravéreau est décédé le 12 octobre 2017 à Aubenas en Ardèche.
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